« Jungle » de Calais : une explosion démographique qui nécessite une prise en charge rapide de l’État.
Après la fermeture de la route des Balkans qui a vu l’installation de nombreux murs de barbelés entre l’Europe de l’Ouest et la Grèce, l’Italie devient à nouveau la porte d’entrée de l’Europe. Depuis janvier 2016, plus de 70 000 réfugiés sont arrivés en Italie (chiffre de début juillet) et plus 3000 personnes ont perdu la vie en voulant traverser la méditerranée. Selon le HCR Haut Commissariat au Réfugiés, près de 30 000 migrants ont transité à Vintimille à la frontière Franco-italienne à côte de Menton depuis le début de l’année. Les tensions importantes constatées à cette frontière sont logiques à la vue du nombre de migrants coincés en Italie. L’État français tente d’en retenir le plus grand nombre et se félicite de l’efficacité des forces de l’ordre pendant que l’opposition LR demande le retour du contrôle permanent à la frontière et davantage de gardes mobiles. Les solutions les plus radicales et indignes de notre démocratie ont montré leur totale inefficacité face à des migrants qui ont risqué leur vie et fui la guerre, la répression ou la pauvreté extrême.
A Calais, cette situation a un impact concret avec l’augmentation du nombre de personnes dans la « jungle ».
Pourtant, depuis mai 2015, le gouvernement français, la Préfecture, le Conseil régional et la municipalité de Calais ont comme objectif de fermer la « jungle » de Calais. Selon les propos de François Hollande, au mois d’avril, « Bernard Cazeneuve a nettoyé ce qui était la jungle » de Calais, en supprimant la moitié sud du bidonville. Mais le constat est sans appel, elle n’a pas disparu et le chiffre 4500 migrants recensés à Calais selon la Préfecture est largement dépassé ! Les recensements effectués par les associations telles que l’Auberge des Migrants en comptaient 7000 en juillet et 9100 en Août dont 865 enfants parmi lesquels 670 non-accompagnés. Les structures d’accueil mis en place par l’Etat sont insuffisantes et inadaptées au regard des besoins : le camp semi-fermé de containers a 1500 places, le centre de mise à l’abri des femmes et enfants 400 places au deux tiers plein en général (pourquoi n’est-il pas plein compte tenu des chiffres mentionnés ?) et le futur centre de mise à l’abri pour mineurs isolés 70.
La situation alimentaire du camp est elle aussi inquiétante : l’État donne entre 3100 à 3500 repas par jour au centre Jules ferry avec des files d’attente de 3 ou 4 heures (30% des besoins), 40% sont donnés par des cuisines associatives (Belgian Kitchen 1000, Kitchen in Calais 1000, Auberge des migrants 2000, Ashram Kitchen 1000 et Kid’s restaurant 200), les 70 restaurants que la préfecture voulait fermer, distribuent environ 850 repas gratuits par jour et en vendaient 1500, soit 20% des besoins (chiffres donnés par les associations d’aide). Le reste est confectionné par les migrants eux-mêmes à partir d’achats dans les épiceries du camp et dans les commerces calaisiens. La volonté de la Préfecture allait accentuer les besoins au sein d’un camp surpeuplé, générant des tensions qui débouchent souvent sur des rixes.
Le vendredi 12 Août, le tribunal administratif de Lille a débouté la préfecture du Pas-de-Calais de sa demande en référé de fermeture des commerces informels installés dans le camp de la « jungle » de Calais.
Dans son ordonnance, le juge estime que « les préoccupations exprimées par le préfet du Pas-de-Calais sont tout à fait compréhensibles » mais que « les conditions d’urgence et d’utilité requises » par la loi « ne sont pas remplies pour faire droit » à sa demande « que soient expulsés les gérants des 72 structures de vente illégales recensées » sur le site.
La FSU 59-62 et le SNES académique se félicitent de la décision du tribunal administratif de Lille, qui permettra au Kids Café de réouvrir et d’apporter aux mineurs non-accompagnés du campement des repas chauds et un espace où ils sont en sécurité. Certes, ces restaurants ne sont pas la solution mais dans l’attente de vraies conditions d’accueil pour ces nombreux migrants, ils restent un pis-aller acceptable. Nous sommes en droit de nous étonner de la procédure de fermeture de ces échoppes pour raisons sanitaires : personne ne souhaite ces migrants en ville et ceux-ci devraient donc vivre dans leur taudis sans vie sociale ? Dans la logique gouvernementale, comment peut-on accepter qu’en France des êtres humains soient si mal logés dans des conditions sanitaires inacceptables et sans un repas assuré au moins une fois par jour
Ces personnes espèrent toujours un passage en Grande Bretagne mais Calais reste une voie sans issue pour nombre d’entre eux.
La FSU 59-62 et le SNES académique soutiennent l’initiative des associations qui demandent à l’État de prendre ses responsabilités sur l’accueil des migrants et de tenir une table-ronde entre les autorités, les représentants des communautés de migrants , les associations et soutiens, afin de trouver les moyens d’assurer dans des conditions correctes, sur le plan sanitaire et dans la dignité, la sécurité alimentaire des personnes présentes sur le camp.
https://fsu62.fsu.fr/wp-content/spip/62/IMG/odt/article_migrants_calais_aout_2016_fsu_et_snes.odt