Quand évaluation rime avec contrôle qualité et obligation de résultat
Attendu depuis plus d’un an, le dispositif d’évaluations nationales de bilan des CM2 vient d’apparaître sur les boîtes à lettres électroniques des inspecteurs chargés des circonscriptions du premier degré.
D’emblée, il apparaît plusieurs traits caractéristiques des méthodes en cours, traits qui interrogent :
· Les délais sont tellement serrés que l’on ne peut qu’envisager des difficultés liées au respect des échéances à tout niveau : information des enseignants, mise en place du matériel, passations des épreuves, corrections, information des parents, remontées des résultats.
· On ne sait encore rien des protocoles d’exercices qui seront soumis à évaluation. Est-ce de la suspicion à l’encontre des acteurs du terrain ? Cela traduit-il de la précipitation des concepteurs et le peu d’importance que l’on accorde au volet pédagogique de cette affaire ?
· Le protocole de saisie et de remontée des résultats en lui-même repose sur une ergonomie complexe peu en phase avec le fonctionnement de nos écoles primaires. On imagine aisément l’expression stupéfaite qui va naître sur le visage des maîtres de CM2 et des directeurs d’école quand ils découvriront ce qu’ils ont à faire.
· De l’information des écoles à la remontée finale des résultats, la succession d’opérations à effectuer constitue en soi une chaîne d’erreurs et d’obstacles potentiels évidente, sauf pour le ministère.
· Cela dit, tout l’appareil hiérarchique est convoqué pour que tout se passe au mieux, avec un dispositif de contrôle de qualité qui consiste en une surveillance pointilleuse de ce qui se passera dans des écoles tests (une par circonscription) sur la base d’une série de critères composant un document de six pages.
L’ensemble de cette opération est présenté par le ministère comme le point d’orgue de sa grande réforme de l’école primaire. Son succès constitue pour lui un objectif fondamental. Dès lors, pendant tout le mois de janvier et la première partie du mois de février, les directeurs d’école, les maîtres de CM2 et les équipes des inspections de circonscription consacreront toute leur énergie à cette réussite. Le reste sera mis entre parenthèses. Sauf les menaces de sanctions et les retenues sur salaires des enseignants poussés à la révolte.
Au stade où nous nous trouvons, plus rien n’étonne les inspecteurs. Le début de l’année 2009 s’annonce donc passionnant. Mais derrière la comédie, se cache hélas la tragédie d’une école publique malmenée en permanence depuis un an. Et cela, au nom d’une idéologie directement inspirée par le management concurrentiel, la menace de sanction des individus, et le culte du chiffre. Au final, qu’évaluera-t-on ? Les résultats des élèves, l’efficacité des maîtres, celle des inspecteurs, ou la clairvoyance du ministère ? L’avenir nous le dira.
Paris le 05 janvier 2009