UN
PSEUDO « PLAN LICENCE » NON CONCERTÉ, SANS EMPLOIS

La
Ministre V. Pécresse vient d’annoncer les mesures du « Plan licence »,
sans réelle concertation avec l’ensemble de la communauté universitaire,
ni avec les organisations syndicales des personnels enseignants, en ignorant
le CNESER. Elle réagit à contretemps à l’exigence d’un collectif budgétaire
pour la réussite en licence portée par le SNESUP à la rentrée 2007. Ce
refus de nous entendre en juillet sur cette question porte déjà un lourd préjudice
aux nouveaux bacheliers.

La
Ministre essaie de présenter son objectif comme très ambitieux : « diviser
par deux et en cinq ans le taux d’échec à l’université », en utilisant
pour sa démonstration des chiffres fallacieux qui dévalorisent le travail
actuel des universitaires.

Depuis
de nombreuses années, le SNESUP exige cette véritable priorité. Il formule
des propositions à ce sujet, en cohérence avec l’objectif d’élévation
générale des qualifications et de 50 % d’une classe d’âge titulaire
d’un diplôme de niveau licence. Si la ministre annonce une augmentation sur
cinq ans du budget de 500 M€ à 714 M€, elle n’annonce aujourd’hui
aucune création d’emploi statutaire.

Parmi
les mesures annoncées, la transformation de la licence.

Si la
conception de la première année développée par la ministre reste floue, on
peut craindre le développement de première année de propédeutique. Or,
nombre d’étudiants qui viennent à l’Université cherchent autre chose
qu’une superterminale.De plus, une telle année pourrait être utilisée
pour mettre en place un processus de sélection. L’entrée dans les études
universitaires suppose une rupture scientifiquement et pédagogiquement
progressive avec les contenus et les méthodes du lycée. Un modèle unique de
première année universitaire n’est pas le moyen de faire réussir plus
d’étudiants. Le SNESUP a défendu des projets bidisciplinaires et
pluridisciplinaires.

Quant
aux seconde et troisième années, au cours desquelles la spécialisation
disciplinaire se ferait, elles seraient aussi l’occasion d’une découverte
du monde professionnel et d’un stage validé dans le cursus pour tous les étudiants.
Mais la question des lieux, du contenu des stages et de leur encadrement est
entière.

L’introduction
de ces nouveaux enseignements permettant à l’étudiant de préciser son
projet professionnel ne doit pas se faire en appauvrissant des contenus
(disciplinaires ou pluridisciplinaires) des formations. Pour la mise en oeuvre
de cette nouvelle licence, est proposé un Cahier des Charges National, qui a
déjà été anticipé par une circulaire de la DGES dans le cadre de la
contractualisation de la vague B et qui permettra le pilotage par le Ministère.

Certaines
des mesures pédagogiques présentées étaient proposées depuis plusieurs
années par le Comité de suivi Licence (enseignant référent, travail en
petits groupes, tutorat), et nous y avions contribué. La Ministre annonce 5
heures hebdomadaires supplémentaires en moyenne par étudiant. C’est
reconnaître que la mise en place du LMD, avec une volonté de baisse des dépenses,
avait considérablement diminué les horaires de formation en licence. Mais
les moyens supplémentaires du budget 2008 (27,4 M€) représentent moins de
30 € par étudiant, c’est-à-dire à peine une heure de TD ! Et les
tuteurs ou les moniteurs ne peuvent faire un travail réellement utile que
s’ils sont encadrés par des personnels titulaires.

Nous ne
pouvons accepter que soit appliqué aux universitaires le « travailler plus
pour gagner plus » sous forme d’« heures complémentaires d’enseignement
». C’est contradictoire avec l’exigence d’une activité de recherche
soutenue ! Et cette proposition ignore la surcharge de travail actuelle des
personnels. Par ailleurs, l’on reviendrait à des « primes pédagogiques »
pour les enseignants coordonnateurs (3 M€, soit un montant de 2000 € pour
les personnels concernés). Cela n’est pas non plus la revalorisation des
carrières et des salaires nécessaire pour tous.

D’autres
mesures concernent l’orientation. Mais, la ministre n’invente rien en
proposant que l’université aille davantage à la rencontre des bacheliers.
C’est une pratique existant depuis de nombreuses années, mais qui se heurte
encore à l’absence de moyens en personnels qualifiés (co-psy par exemple)
et à l’absence de prise en compte de ces activités dans le service des
enseignants. Quant à la ré-orientation au cours de la première année, elle
a jusqu’ici fait preuve de son inefficacité, les étudiants ne souhaitant
pas changer si rapidement d’orientation et l’organisation de l’année
universitaire étant différente d’une université à l’autre, d’un
domaine à l’autre.

Enfin,
la Ministre propose d’accorder la priorité aux bacheliers technologiques en
IUT et professionnels en BTS, ce qui passerait pour les IUT par une incitation
financière. Pour le SNESUP, cela ne saurait se traduire pour les étudiants
de baccalauréats technologiques par une orientation obligatoire vers des filières
courtes et le refus de construire dès la licence des parcours de la réussite
pour ces étudiants leur permettant la poursuite en Master. Cela ne saurait se
traduire par une limitation de l’accueil des bacheliers généraux en IUT,
sauf à augmenter la part d’orientation par défaut en licence.

Ce dont
les étudiants ont besoin pour réussir dès la première année de Licence,
c’est d’un enseignement en plus petits groupes, avec des enseignants
qualifiés pouvant mettre en place de nouvelles méthodes pédagogiques.

Cela nécessite
donc des recrutements et une augmentation du budget consacré aux activités pédagogiques.

Cela nécessite
donc des actions de formation initiale et continue des personnels, et
notamment de formation pédagogique des enseignants.

La
bataille du SNESUP pour la réussite des étudiants s’inscrit totalement
dans le mouvement amorcé contre une conception technocratique, autocratique
et concurrentielle des établissements d’enseignement supérieur.

Modifier
et réorienter le budget, abroger et, dans un premier temps, suspendre la loi
LRU, c’est indispensable pour les missions de recherche et de formation.